« La Vénus moderniste. »

Alors que la fraîcheur de janvier enveloppait la nuit barcelonaise de son voile muet, ce jeudi 22 janvier 2015, qu’il fut bon de retrouver la demeure moderniste de « chez Clo », dont les fenêtres dessinaient un havre douillet pour le visiteur transi.
Au programme ce soir-là, dans la série « théâtre en V.O », une pièce de théâtre du dramaturge français Christian Siméon ( Molière de l’auteur 2007), « La Vénus au Phacochère », pièce épistolaire à trois personnages interprétée par la magistrale Isabelle Bres du « Théâtre sur Ottomane », le « théâtre qui vient chez vous », comme le dit « Clo » dans son beau sourire.
La Vénus est Misia Sert, épouse dès 1920, du peintre et photographe catalan José Maria Sert – oncle de l’architecte du même nom. Christian Siméon nous raconte la vie de Misia de 1896 à 1897. Moment crucial où, épouse de Thadée, un des trois frères Natanson directeur de « La revue Blanche », Misia, 25 ans – pianiste -, expérimente la tragique déception de l’amour.
Egérie du tout Paris artistique – pour ne citer qu’eux, Mallarmé, Péguy, Proust, Toulouse-Lautrec, Bonnard, Vuillard, Debussy, Satie… avec Misia, on se noie dans l’océan de la célébrité -, Misia s’est retirée à la campagne à Villeneuve. Son mari l’enjoint de revenir à Paris pour un diner chez l’avocat et homme politique Waldeck-Rousseau – capricieuse et joueuse, elle est avant tout son inspiratrice à lui, il la réclame. Mais elle se fait prier. Elle se divertit par lettres avec son amie Geai Simpson, libertine modiste qui met au point un modèle de soutien-gorge nommé garde- sein censé remplacer l’étouffante gaine. On parle de triolisme, d’Ubu Roi et de Léon Blum. On navigue sur le terrain de la féminité et de la misogynie – le texte de Strindberg publié par « La Revue Blanche » leur fait horreur -, jusqu’au drame.